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Meuglement des vaches Une loi face aux troubles du voisinage

"Ce n'est pas à l'agriculteur de faire l'effort", réagit le ministre de la Justice, Eric Dupont-Moretti, au sujet des troubles du voisinage.

« Un voisin ne pourra plus se plaindre de nuisances qui préexistent à son emménagement », a annoncé le ministre de la Justice qui prépare un texte de loi pour septembre en matière de troubles du voisinage.

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« C’est celui qui vient d’arriver qui doit s’adapter à l’autre », estime Eric Dupont-Moretti. Interrogé le 3 mars 2023 sur les troubles de voisinage lors d’une conférence organisée au Salon international de l’agriculture (1), le ministre de la Justice s’est voulu inflexible face à « ces Parisiens venus s’installer près d’une ferme. Cela génère des tas de procès ces trucs-là, mais il ne faut pas que l’on emmerde les gens pour leur travail. Ça n’est pas à l’agriculteur de faire l’effort. Avec ce texte, à venir en septembre, nous allons remettre l’église au milieu du village quand bien même les cloches sont parfois aussi jugées gênantes. »

Pouvoir agrandir son troupeau

Présent à cette conférence, l’avocat Timothée Dufour, qui défend plusieurs agriculteurs mis en cause dans des affaires de troubles du voisinage, a interpellé le ministre. Selon lui, cette mesure sur l’antériorité sera insuffisante. « Dans deux heures, je pars dans l'Eure-et-Loir, a-t-il commencé. Je vais dans une réunion de conciliation entre trois exploitations agricoles et des voisins. Ces derniers s’opposent à ces trois exploitations en raison du « meuglement des vaches même la nuit ». Je vais y aller en faisant preuve de pédagogie, je vais rappeler le droit. Mais je vais y aller aussi avec une faiblesse juridique. L’antériorité ne va pas jouer parce que les plaignants étaient là avant l’arrivée des exploitations agricoles. »

« Nous avons besoin d’une évolution de la réglementation, a-t-il poursuivi. Nous avons besoin de consacrer ce principe de l’antériorité, mais peut-être aussi d’ajouter que son cheptel peut évoluer dans le temps. Un agriculteur n’est pas condamné à 30 ou 40 génisses. S’il veut passer à 80-90, il en a le droit. Les agriculteurs sont des entrepreneurs ! Aujourd’hui, le juge va apprécier l’évolution de son cheptel et s’il y a une évolution sensible, il va considérer qu’il y a une nuisance, et que l’antériorité ne joue pas. »

Un inventaire au point mort

Timothée Dufour a également pointé du doigt l’inventaire du patrimoine sensoriel des campagnes prévu par la loi du 29 janvier 2021 : « Ce travail n’a pas encore été mené par les Régions : il faut les encourager à le faire ! » Sous l’égide des préfets de Région et des Drac (Direction régionale des affaires culturelles) du ministère de la Culture, les services d’inventaires sont en effet tenus d'établir un descriptif pour constituer un patrimoine sensoriel des sons et des odeurs de la campagne. Le ministre a convié l’avocat à travailler avec son équipe sur le futur texte législatif « qui devra prendre en compte tous ces paramètres ».

(1) la FNSEA, la MSA, Chambre d’agriculture France et Jeunes Agriculteurs.

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